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Budget fédéral 2021 : Principales mesures fiscales

Auteurs : Elie Roth, Paul Lamarre , Christopher Anderson, Michael N. Kandev, Marie-Emmanuelle Vaillancourt, Julie Colden, Sharon Ford, Olivia Khazam, James Trougakos, Reuben Abitbol, Cadie Yiu et Ariane Hunter-Meunier

Le 19 avril 2021, l’honorable Chrystia Freeland, vice-première ministre et ministre des Finances du Canada, a présenté le premier budget du gouvernement fédéral libéral (le « budget de 2021 ») depuis plus de deux ans et le premier depuis le début de la pandémie mondiale de COVID-19.

Le budget de 2021 fait partie d’un plan de relance axé sur « les emplois, la croissance et la résilience » et prévoit plus de 100 milliards de dollars de dépenses de relance destinées, notamment, à la subvention salariale d’urgence du Canada (la « SSUC »), à la subvention d’urgence du Canada pour le loyer (la « SUCL »), au maintien de l’Indemnité de confinement jusqu’en septembre 2021 et au lancement du nouveau Programme d’embauche pour la relance du Canada. D’autres mesures de relance visent les personnes âgées, les parents, les petites entreprises et d’autres personnes et entités qui ont été touchées par la pandémie, ainsi que le soutien d’initiatives écologiques. Le déficit atteignait 354 milliards de dollars en 2020 et aucun budget équilibré n’est prévu et les dépenses déficitaires devraient se poursuivre pour les cinq prochaines années, soit jusqu’en 2026.

Même si les sociétés canadiennes se remettent encore des conséquences économiques de la pandémie, le budget de 2021 comprend de nombreux changements fiscaux importants concernant les sociétés au Canada et les opérations internationales. Ces changements comprennent, notamment, une nouvelle règle sur le dépouillement des bénéfices qui limite la déductibilité des intérêts aux fins de l’impôt en fonction des bénéfices, des mesures visant des initiatives écologiques et une disposition permettant aux sociétés sous contrôle canadien de passer en charges plus rapidement leurs investissements dans certaines immobilisations. Le gouvernement maintient aussi son engagement, d’abord déclaré dans son Énoncé économique de l’automne 2020, de prendre des mesures en vue de renforcer et de moderniser la règle générale anti-évitement du Canada en mettant en œuvre un processus de consultation.

Sur le plan de la fiscalité internationale, le budget de 2021 propose de nouvelles règles visant les « dispositifs hybrides » cadrant avec l’adhésion du Canada au projet de lutte contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (le « BEPS ») de l’Organisation de coopération et de développement économiques (l’« OCDE »). Selon les règles proposées, de façon générale, les sociétés canadiennes peuvent se voir refuser une déduction pour des paiements versés à un non-résident si les paiements ne sont pas imposables pour le non-résident et, de même, les sociétés canadiennes peuvent devoir payer des impôts sur des paiements reçus d’un non-résident (y compris des dividendes qui seraient autrement déductibles) si le non-résident a droit à une déduction à l’égard des paiements. De plus, le budget de 2021 annonce la tenue de consultations et la publication d’un document de consultation sur les règles canadiennes sur les prix de transfert, par suite de l’arrêt prononcé contre l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Sa Majesté la Reine c. Cameco Corporation (l’« affaire Cameco »)1. Dans cette affaire, la Cour d’appel fédérale a jugé que l’objectif des règles canadiennes sur les prix de transfert était de faire en sorte que les opérations entre parties sans lien de dépendance se fassent dans des conditions de pleine concurrence, et non de permettre que des opérations juridiquement valables soient requalifiées à des fins fiscales.

Plusieurs autres mesures visant à rehausser les recettes sont incluses ou annoncées dans le budget de 2021. Même si le Canada reste attaché à une approche multilatérale consensuelle en ce qui concerne l’imposition de l’économie numérique, le budget de 2021 va de l’avant avec un projet de loi visant une taxe unilatérale canadienne de 3 % sur les services numériques et rajuste les règles concernant la TPS/TVH s’appliquant au commerce électronique, deux mesures qu’il avait annoncées dans l’Énoncé économique de l’automne 2020. Le budget de 2021 prévoit également une nouvelle taxe de 1 % sur la valeur de biens immobiliers résidentiels appartenant à des non-résidents qui sont considérés comme vacants ou sous-utilisés et une nouvelle taxe de luxe sur les ventes de voitures et d’aéronefs (d’une valeur de 100 000 $ ou plus) et de bateaux (d’une valeur de 250 000 $ ou plus).

Il importe de noter, sur le plan de l’administration fiscale, que conformément à l’Énoncé économique de l’automne 2020 et à des budgets antérieurs, l’ARC s’est vu accorder des ressources considérables pour lutter contre « l’évasion fiscale et l’évitement fiscal abusif », et particulièrement à l’égard des audits et risques en matière de TPS/TVH, de l’évasion fiscale associée aux fiducies et du recouvrement des dettes fiscales. De plus, le budget de 2021 propose d’élargir l’éventail des cas dans lesquels l’ARC doit être avisée d’opérations présentant une planification fiscale « agressive » et impose de nouvelles exigences concernant les opérations à signaler et l’obligation pour les sociétés déterminées, canadiennes et non résidentes, de déclarer des traitements fiscaux incertains. Une mesure de resserrement prévue par le budget empêche les contribuables d’éviter le recouvrement de dettes fiscales au moyen de transferts de biens. Le budget de 2021 confirme le fait que les fonctionnaires de l’ARC ont le pouvoir d’exiger que des personnes répondent à leurs questions pertinentes et leur fournissent toute l’aide raisonnable aux fins liées à l’application et à l’exécution des lois fiscales. Des mesures susceptibles d’avoir des conséquences pour les organismes de bienfaisance canadiens sont intégrées dans des initiatives visant à lutter contre le blanchiment d’argent et le financement des activités terroristes.

Le budget de 2021 contient un grand nombre de propositions importantes que nous examinons ci-dessous, mais n’apporte aucun changement aux taux d’imposition généraux des particuliers ou des sociétés, ni au taux d’inclusion des gains en capital. L’exemption pour résidence principale n’a pas été modifiée et aucun impôt général sur la fortune n’a été créé.

Mesures fiscales internationales

Dispositifs hybrides

Les dispositifs hybrides sont des structures transfrontalières qui exploitent les différences entre le traitement fiscal réservé aux entités ou aux instruments financiers en vertu des lois d’un pays et leur traitement fiscal en vertu des lois d’un autre ou de plusieurs autres pays dans le but d’obtenir un résultat fiscal particulier. En 2015, les dispositifs hybrides ont fait l’objet d’un rapport de l’OCDE intitulé Neutraliser les effets des dispositifs hybrides (le « Rapport Action 2 »). Le Rapport Action 2 a recommandé l’adoption de règles visant à limiter les avantages fiscaux résultant de l’utilisation de dispositifs hybrides.

Le Rapport Action 2 porte sur deux formes principales de dispositifs hybrides : les dispositifs hybrides produisant des effets de déduction/non-inclusion, qui résultent d’une situation où un pays permet une déduction à l’égard d’un paiement transfrontalier dont le montant n’est pas inclus dans un délai raisonnable dans le revenu entièrement imposable dans l’autre pays; et les dispositifs hybrides produisant des effets de double déduction, qui résultent d’une situation où une seule dépense donne droit à une déduction fiscale dans deux ou plusieurs pays.

Le Rapport Action 2 traite également des dispositifs hybrides importés, qui découlent généralement d’une situation où un paiement est déductible pour une entité dans son pays de résidence et est également inclus dans le revenu ordinaire de l’entité bénéficiaire résidant dans un autre pays, mais où une déduction est appliquée en compensation de ce revenu ordinaire au moyen d’un dispositif hybride entre l’entité bénéficiaire et une entité résidant dans un troisième pays. Enfin, dans un supplément au Rapport Action 2, l’OCDE recommande des règles additionnelles à l’égard des dispositifs incluant une succursale, qui produisent généralement des asymétries semblables à celles des dispositifs hybrides.

Aux États-Unis, les recommandations du Rapport Action 2 ont été effectivement intégrées dans la loi de 2017 intitulée Tax Cuts and Jobs Act. Dans l’Union européenne, elles ont été intégrées dans la Directive anti-évasion fiscale 2, entrée en vigueur le 1er janvier 2020. Au Canada, à ce jour, la législation fiscale ne contient pas de règles contre les dispositifs hybrides, mises à part certaines dispositions de la Convention fiscale entre le Canada et les États-Unis d’Amérique de 1980.

Tout en stipulant que le gouvernement peut invoquer les règles fiscales canadiennes existantes pour contester certains dispositifs hybrides, le budget de 2021 propose maintenant l’adoption de règles précises à l’égard de dispositifs hybrides que mettent en œuvre des contribuables canadiens.

De façon générale, selon les principales règles proposées dans le budget de 2021, un paiement versé par un résident canadien conformément à un dispositif hybride ne serait pas déductible aux fins de l’impôt sur le revenu du Canada s’il donne lieu à une déduction dans un autre pays ou n’est pas inclus dans le revenu ordinaire du bénéficiaire non résident. Inversement, si un paiement versé conformément à un dispositif hybride par une entité qui n’est pas résidente du Canada est déductible aux fins de l’impôt sur le revenu d’un autre pays, son bénéficiaire résident canadien n’a droit à aucune déduction pour ce paiement. Tout tel paiement reçu par un résident canadien devrait être inclus dans son revenu et, si le paiement est un dividende, il ne lui donnerait pas droit à la déduction habituellement autorisée pour certains dividendes reçus de sociétés étrangères du même groupe. En fait, ces règles neutraliseraient les asymétries en harmonisant le traitement fiscal au Canada et le traitement fiscal dans l’autre pays concerné.

Dans un avis adressé aux fiscalistes le 5 juillet 2019, l’ARC a décrit un type de dispositif qui pourrait être visé par les règles contre les dispositifs hybrides proposées. La situation décrite dans l’avis concerne une société canadienne qui finance les intérêts à verser annuellement sur un prêt que lui a consenti sa société mère américaine en concluant des accords en vue de la vente à terme d’actions non émises avec une filiale américaine – une SARL – de la société mère. La société canadienne verse les paiements anticipés reçus de la SARL aux termes des accords de vente à terme (lesquels paiements proviennent de sommes que verse annuellement la société mère à la SARL) à sa société mère pour payer les intérêts échus. Il est probable que ce dispositif ait été conçu dans le but d’éviter de générer des intérêts créditeurs aux États-Unis tout en procurant une déduction pour intérêts au Canada.

Le budget de 2021 ne contient pas de projet de loi en vue de la mise en œuvre des règles proposées. Il énonce toutefois les principes suivants :

  • les règles proposées seraient de nature mécanique et ne seraient pas conditionnelles à un test d’objet;
  • sauf quelques exceptions, les règles proposées s’appliqueraient relativement aux paiements effectués entre parties liées et aux paiements effectués conformément à certains dispositifs entre parties non liées qui sont conçus pour entraîner une asymétrie;
  • l’ordre de priorité que recommande le Rapport Action 2 (à savoir que le refus de la déduction d’un paiement a priorité sur une règle défensive prévoyant l’inclusion du paiement dans le revenu) s’appliquerait également afin que les règles proposées soient coordonnées avec les règles semblables d’autres pays.

Les règles proposées pour lutter contre les dispositifs hybrides seraient mises en œuvre en deux tranches législatives distinctes. La première comprendrait les règles visant à neutraliser l’asymétrie déduction/non-inclusion résultant d’un paiement versé relativement à un instrument financier. Cette première tranche législative serait publiée pour commentaires des intéressés vers la fin de 2021 et les règles concernées s’appliqueraient à compter du 1er juillet 2022. La seconde tranche législative serait publiée pour commentaires des intéressés après 2021 et les règles concernées s’appliqueraient au plus tôt en 2023. Cette seconde tranche comprendrait des règles conformes aux recommandations du Rapport Action 2 n’ayant pas été incluses dans la première tranche et dont on peut supposer qu’elles visent des situations qui préoccupent moins le gouvernement du Canada.

Prix de transfert

En vertu des règles canadiennes sur les prix de transfert, lorsque les modalités d’une opération ou d’une série d’opérations transfrontalières entre personnes ayant un lien de dépendance ne reflètent pas des conditions de pleine concurrence, les autorités fiscales sont en droit de rajuster les sommes ou la nature des sommes concernées afin qu’elles reflètent des conditions de pleine concurrence. De plus, les règles sur les prix de transfert comprennent une « règle sur la requalification » qui s’applique lorsqu’une opération qui n’est pas conclue dans des conditions de concurrence normale i) n’aurait pas été conclue entre personnes n’ayant aucun lien de dépendance et ii) a été prévue principalement pour obtenir un avantage fiscal. Dans un tel cas, les autorités fiscales peuvent remplacer l’opération par l’opération qui aurait été conclue entre personnes n’ayant aucun lien de dépendance.

Le budget de 2021 annonce l’intention du gouvernement de tenir des consultations sur les règles sur les prix de transfert compte tenu de l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Cameco, dans lequel la Cour a indiqué son désaccord avec l’interprétation générale que fait le gouvernement de la règle sur la requalification et est arrivée à la conclusion que le gouvernement ne peut pas changer la nature d’une opération si sa structure est objectivement raisonnable, même si elle repose sur des motivations fiscales. D’après la Cour, le fait qu’une société canadienne n’aurait pas conclu l’opération en cause avec un non-résident s’il avait été sans lien de dépendance n’était pas un fait pertinent. Dans le budget de 2021, le gouvernement constate les « lacunes des règles actuelles sur les prix de transfert » et annonce son intention de publier un document de consultation au cours des prochains mois.

De plus, le budget de 2021 confirme l’intention du gouvernement d’aller de l’avant avec les propositions législatives rendues publiques le 30 juillet 2019, qui i) accordent aux règles sur les prix de transfert la priorité sur d’autres dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) (la « LIR ») qui concernent également le rajustement des conséquences fiscales canadiennes des opérations entre personnes ayant un lien de dépendance, et ii) prolongent la période normale de nouvelle cotisation (généralement de trois ou quatre ans) de trois années supplémentaires pour les opérations visées par les règles sur les prix de transfert.

Enfin, le budget de 2021 contient une déclaration laissant entendre que le Canada a accepté les nouvelles lignes directrices en matière de prix de transfert élaborées dans le cadre du BEPS, mais cette déclaration ne semble pas cadrer avec les communications officielles précédentes sur le même sujet. En effet, dans le budget de 2016, le Canada avait indiqué qu’il ne rajusterait pas ses pratiques administratives à l’égard de deux sujets visés par les travaux de l’OCDE sur les prix de transfert associés au BEPS – l’approche simplifiée proposée à l’égard des services à faible valeur ajoutée et le traitement des entités fortement capitalisées (cash boxes) – et qu’il déciderait d’une ligne de conduite relativement à ces deux sujets une fois les travaux de suivi de l’OCDE terminés. Il est difficile de déterminer si le budget de 2021 confirme que le gouvernement canadien rajustera ses pratiques en ce qui concerne ces deux sujets.

Imposition des logements au Canada appartenant à des propriétaires étrangers non résidents

Dans son Énoncé économique de l’automne 2020, le gouvernement a annoncé son intention de prendre des mesures en vue d’établir une mesure fiscale nationale visant l’usage improductif de logements au Canada appartenant à des non-résidents, dans le but de rendre le marché du logement plus abordable pour les jeunes acheteurs canadiens. Dans le budget de 2021, le gouvernement a proposé d’imposer, à compter du 1er janvier 2022, une taxe annuelle de 1 % sur la valeur des biens immobiliers résidentiels appartenant à des personnes non résidentes et non citoyennes du Canada qui sont considérés comme vacants ou sous-utilisés. Tous ces propriétaires, s’ils ne sont ni citoyens canadiens ni résidents permanents du Canada, devront produire une déclaration annuelle concernant l’utilisation du bien immobilier et l’admissibilité éventuelle à une exemption; des sanctions seront imposées à ceux qui ne la produiront pas. Le gouvernement publiera un document de consultation pour donner aux intéressés l’occasion de présenter leurs commentaires, lequel contiendra davantage de précisions et les paramètres de la taxe proposée.

Taxe sur les services numériques

Le budget de 2021 propose l’imposition d’une taxe sur les services numériques (la « TSN »), qui avait d’ailleurs déjà été annoncée. La TSN, qui vise les grandes entreprises fournissant des services numériques, entrera en vigueur le 1er janvier 2022. Cette taxe de 3 % s’appliquerait aux revenus tirés par ces entreprises des relations qu’elles entretiennent en ligne avec des utilisateurs au Canada, y compris la collecte, le traitement et la monétisation des données et des contributions de contenu de ces utilisateurs (par l’entremise de marchés en ligne, de médias sociaux, de publicités en ligne ou de données d’utilisateurs, par exemple). La TSN vise les grandes entreprises, canadiennes ou étrangères, dont les revenus mondiaux bruts de toutes sources s’élèvent à 750 millions d’euros ou plus, dont plus de 20 millions de dollars sont associés annuellement à des utilisateurs canadiens. Dans le cas d’un groupe multinational, une entité désignée serait tenue de produire annuellement une déclaration auprès des autorités canadiennes et de payer la TSN échue pour le compte du groupe.

La TSN est présentée comme une obligation fiscale qui n’est pas fondée sur le revenu, caractéristique qui semble laisser supposer que les exemptions prévues par les conventions fiscales ne pourraient y faire obstacle. La TSN est proposée comme une mesure provisoire adoptée en attendant l’entrée en vigueur d’une approche multilatérale acceptable visant les entreprises concernées. Le gouvernement fédéral a l’intention d’engager un dialogue avec les provinces et les territoires pour discuter des incidences de la TSN. Il est prévu que des propositions législatives en lien avec une nouvelle loi visant à mettre en œuvre la TSN seront publiées afin de solliciter les commentaires du public au cours de l’été 2021, qui tiendront compte des réactions reçues jusque-là. Les intéressés doivent présenter leurs commentaires par écrit au ministère des Finances d’ici le 18 juin 2021.

Mesures concernant l’impôt sur le revenu

Limitation de la déductibilité des intérêts

Le budget de 2021 propose une nouvelle limitation générale de la déductibilité des intérêts et des dépenses semblables, qui entrerait en vigueur en 2023. Des règles semblables de limitation de la déductibilité des intérêts sont en cours d’élaboration depuis au moins 2015, année où l’OCDE a publié des orientations à l’égard de telles limitations dans le cadre du BEPS. Un certain nombre d’autres pays (dont les pays de l’Union européenne et les États-Unis) ont adopté des règles généralement conformes aux recommandations de l’OCDE. Les règles de limitation de la déductibilité des intérêts faisaient partie du programme électoral de 2019 du Parti libéral. L’objectif déclaré de ces règles est de lutter contre l’érosion de l’assiette fiscale canadienne résultant de paiements d’intérêts à des non-résidents liés dans des pays à faible taux d’imposition, du recours aux emprunts pour financer des investissements rapportant un revenu non imposable et de l’affectation à des entreprises canadiennes d’une part disproportionnée des emprunts d’un groupe multinational contractés auprès de tiers.

Sous réserve de certaines exceptions, la déductibilité des intérêts et des autres dépenses liées au financement serait refusée aux sociétés par actions, aux sociétés de personnes et aux fiducies si leurs dépenses, déduction faite des intérêts et des autres dépenses liées au financement, dépassaient un ratio fixe de leur BAIIDA. Pour 2023, ce ratio serait de 40 % et pour les années suivantes, de 30 %. En général, les petites entreprises, particulièrement les sociétés privées sous contrôle canadien qui (avec toutes leurs sociétés associées) comptent un capital imposable utilisé au Canada inférieur à 15 millions de dollars, et les groupes de sociétés et de fiducies dont les dépenses nettes en intérêts s’élèvent à moins de 250 000 $ seraient exclues des règles de limitation de déductibilité des intérêts.

Ces nouvelles règles ne s’appliqueraient pas aux intérêts qui ne sont déjà pas déductibles, y compris selon les règles de capitalisation restreinte, qui limitent généralement la déductibilité des intérêts sur la dette due à certains non-résidents lorsque la dette est supérieure de plus de 1,5 fois aux capitaux propres du débiteur appartenant aux non-résidents, et qui continueront de s’appliquer. En général, la déductibilité des intérêts sur des dettes entre membres canadiens d’un groupe de sociétés (y compris aux termes d’un accord de transfert de pertes) ne serait pas limitée par les nouvelles règles. Les intérêts refusés selon les nouvelles règles pourraient être reportés rétrospectivement jusqu’à trois ans et prospectivement jusqu’à vingt ans, conformément aux dispositions concernant les pertes autres qu’en capital.

Les règles prévoiraient des mesures d’allègement pour les groupes d’entités, qui permettraient aux entités formant un groupe de partager toute capacité inutilisée de déduction d’intérêts. De plus, les règles incluraient le principe de « ratio du groupe », selon lequel un contribuable serait en droit de déduire les intérêts nets excédant le ratio fixe s’il est en mesure de démontrer que le ratio des intérêts nets payés à des tiers par rapport au BAIIDA comptable du groupe dont il fait partie indique qu’une limite de déduction supérieure est appropriée. Il est précisé dans l’information publiée en marge du budget de 2021 que, conformément à ces mesures d’allègement, il est prévu que les sociétés canadiennes autonomes membres d’un groupe n’incluant aucun non-résident ne verraient pas, dans la plupart des cas, leurs déductions de dépenses en intérêts limitées selon les règles proposées.

Des règles spéciales sont proposées pour les banques et les compagnies d’assurance-vie, à qui il serait généralement interdit de transférer leur capacité inutilisée de déduction d’intérêts à d’autres membres de leur groupe de sociétés qui ne sont pas également des entités réglementées du secteur bancaire ou du secteur de l’assurance. Dans leur version actuelle, les règles proposées ne réservent pas de traitement spécial à d’autres secteurs d’activité, comme les investissements immobiliers, qui sont l’objet de règles spéciales aux États-Unis.

Des propositions législatives devraient être publiées au cours de l’été et devraient donner des éclaircissements quant à l’étendue et à l’application de ces règles.

Nouvelles obligations de déclaration

Le budget de 2021 prévoit le lancement d’une consultation à l’égard de bon nombre des nouvelles obligations de déclaration proposées. Ces propositions visent à étendre les règles actuelles sur les opérations à déclarer et les abris fiscaux à déclarer afin que l’ARC soit avisée des positions agressives du point de vue de la planification fiscale et afin d’harmoniser les règles avec les nouvelles dispositions internationales, y compris celles qui ont été proposées dans le cadre du BEPS. Le budget de 2021 comprend des règles en lien avec ces propositions, qui reportent les périodes de nouvelle cotisation de façon à ce que la période normale de nouvelle cotisation ne commence pas avant que les obligations de déclaration aient été satisfaites et qui imposent des pénalités importantes lorsque les nouvelles obligations de conformité et de déclaration ne sont pas satisfaites. Dans certains cas, ces pénalités peuvent représenter jusqu’à 25 % de l’avantage fiscal.

Si elles sont adoptées, les modifications proposées s’appliqueront aux années d’imposition commençant après 2021 et aux opérations réalisées à compter du 1er janvier 2022. Les pénalités ne seront pas imposées à l’égard d’opérations conclues avant que la législation ne reçoive la sanction royale.

Des propositions législatives visant les règles proposées devraient être publiées au cours des prochaines semaines. Les commentaires sur les règles proposées doivent être présentés d’ici le 3 septembre 2021.

Changements apportés aux règles sur les opérations à déclarer

La LIR exige actuellement que les « opérations d’évitement » (c’est-à-dire les opérations réalisées principalement dans le but d’obtenir un avantage fiscal) soient déclarées lorsque deux des trois critères suivants sont remplis :

  • des honoraires conditionnels sont versés à un promoteur ou à un conseiller en fiscalité en fonction de l’avantage fiscal découlant de l’opération ou du nombre de participants à l’opération;
  • un promoteur ou un conseiller en fiscalité bénéficie d’une clause de confidentialité relativement à l’opération;
  • un promoteur, un conseiller, un participant ou une personne ayant un lien de dépendance obtiennent une protection contractuelle relativement à l’opération, telle qu’une assurance contre le risque de non-obtention de l’avantage fiscal.

En vue d’harmoniser les règles sur les opérations à déclarer et les dispositions internationales (dont celles du BEPS), le budget de 2021 propose ce qui suit :

  • exiger la déclaration de l’opération seulement si l’un quelconque des critères ci-dessus est rempli;
  • modifier la définition d’« opération d’évitement » pour que soit considérée comme une opération d’évitement toute opération dont l’un des principaux objets (et non l’objet principal) est l’obtention d’un avantage fiscal;
  • exiger que la déclaration de l’opération se fasse généralement dans les 45 jours suivant sa conclusion;
  • exiger que tous les participants, promoteurs et conseillers associés à l’opération déclarent celle-ci (sous réserve d’une exception dans la mesure où s’applique le privilège du secret professionnel de l’avocat).

Le fait qu’un seul des trois critères doit être rempli et que le critère des objets de l’opération porte sur « un des principaux objets » et non plus sur l’« objet principal » pourrait faire en sorte qu’un large éventail d’opérations de fusion et acquisition soit assujetti à l’obligation de déclaration, de telles opérations comprenant souvent des protections contractuelles concernant les attributs fiscaux d’une cible ou pouvant comporter des exigences de confidentialité en faveur de certaines parties pouvant être considérées comme des promoteurs selon ces règles.

Opérations à signaler

Le budget de 2021 exige que soient signalés certains types d’opérations qui pourraient ne pas être assujettis aux règles sur les opérations à déclarer. Cette exigence proposée est conforme aux règles sur les « opérations répertoriées » (listed transactions) adoptées aux États-Unis et aux règles semblables adoptées au Royaume-Uni, en Australie et au Québec. Des précisions seront données sur les opérations à signaler au cours du processus de consultation. En général, un participant à une opération à signaler aura l’obligation de signaler celle-ci dans les 45 jours de sa conclusion. Les promoteurs et conseillers auront une obligation semblable (sous réserve d’une exception dans la mesure où s’applique le privilège du secret professionnel de l’avocat).

Obligation de sociétés déterminées de déclarer des positions fiscales incertaines

Il est proposé dans le budget de 2021 d’exiger de certains contribuables qu’ils déclarent toute position fiscale incertaine dans leur déclaration de revenus. Des mesures semblables ont déjà été adoptées aux États-Unis et en Australie et ont été proposées au Royaume-Uni. Selon le budget de 2021, l’obligation de déclarer toute position fiscale incertaine s’appliquera à la fois aux sociétés canadiennes et aux sociétés non résidentes qui i) sont tenues de produire une déclaration de revenus au Canada; ii) détiennent plus de 50 millions de dollars d’actifs à la fin de leur exercice, selon leur bilan non consolidé; iii) ont des états financiers audités établis conformément aux PCGR canadiens, aux IFRS ou à d’autres PCGR propres à un pays (les PCGR américains, par exemple); et iv) ont déclaré une position fiscale incertaine dans ces états financiers audités.

Pour chaque position fiscale incertaine devant être déclarée, la société serait tenue de fournir des renseignements prescrits, comme la valeur des impôts en cause, et une description concise des faits pertinents et du traitement fiscal choisi et d’indiquer si l’incertitude est liée à une différence permanente, ou temporaire, en impôt.

Prérogatives en matière de vérification

Même si, en général, les pouvoirs de l’ARC en termes de vérification sont plutôt vastes, la Cour d’appel fédérale, dans l’affaire Canada (Revenu national) c. Cameco Corporation a confirmé la décision de la Cour fédérale qui a interdit à l’ARC d’exiger, comme elle le fait depuis longtemps, que les contribuables et leurs employés se soumettent à des entrevues dans le cadre d’une vérification. La Cour d’appel fédérale a statué que les pouvoirs de l’ARC, en vertu de l’alinéa 231.1(1)a) de la LIR, d’« inspecter, vérifier ou examiner » les livres et registres d’un contribuable ne lui permettaient pas d’exiger qu’un contribuable ou ses employés se soumettent à des entrevues orales. Le budget de 2021 propose des modifications qui permettraient de passer outre à la décision dans l’affaire Cameco et qui donneraient à l’ARC la prérogative d’exiger des contribuables qu’ils répondent à toutes les questions pertinentes et qu’ils fournissent toute l’aide raisonnable, aux fins liées à l’application et à l’exécution de la LIR, de la Loi sur la taxe d’accise (Canada) (la « LTA »), de la Loi sur l’accise (Canada), de la Loi sur le droit pour la sécurité des passagers du transport aérien et de la partie 1 de la Loi sur la tarification de la pollution par les gaz à effet de serre (la « LTPGES »). Ces modifications confèrent à l’ARC la prérogative d’exiger que les personnes répondent à ses questions verbalement ou par écrit, et s’appliqueront dès la sanction royale reçue.

Évitement des dettes fiscales

La LIR contient des règles qui visent à empêcher un contribuable de se soustraire à ses obligations fiscales en transférant des actifs à une personne avec qui il a un lien de dépendance pour une contrepartie insuffisante. Certains contribuables auraient effectué des opérations permettant d’éviter l’application de ces règles, souvent dans le cadre de stratégies de planification fiscale complexes. Dans certains cas, cette planification consiste à réaliser une opération qui entraîne une dette fiscale dans l’année suivant l’année du transfert des actifs. Le budget de 2021 propose de nombreuses modifications qui étendent ces règles et imposent des pénalités à ceux qui participent à la promotion de telles stratégies. Ces règles s’appliqueront aux opérations conclues à compter de la date du budget. Des règles semblables seront adoptées aux fins de la LTA, de la Loi sur l’accise et de la LTPGES.

Passation en charges immédiate

Le budget de 2021 met en œuvre des mesures temporaires qui permettraient la passation en charges immédiate de certains « biens admissibles » acquis par une société privée sous contrôle canadien (une « SPCC ») jusqu’à une limite de 1,5 million de dollars par année d’imposition; les mesures s’appliqueraient aux biens acquis à compter de la date du budget et qui sont prêts à être mis en service avant le 1er janvier 2024.

Les biens admissibles comprennent généralement tout bien amortissable, à l’exception d’un bien compris dans les catégories de déduction pour amortissement (une « DPA »), qui sont des actifs à long terme (les actifs de catégorie 1, par exemple). Toutefois, les biens admissibles qui ont été utilisés, ou acquis pour être utilisés, à quelque fin que ce soit avant d’être acquis par une SPCC ne pourraient être l’objet d’une passation en charges immédiate que si i) ni la SPCC ni une personne avec qui elle a un lien de dépendance n’en était auparavant le propriétaire et ii) les biens admissibles n’ont pas été acquis par la SPCC avec report d’impôt.

Les SPCC dont les coûts en capital dépassent la limite de 1,5 million de dollars (qui vaut pour tous les membres d’un groupe de sociétés) seraient autorisées à décider à quelle catégorie d’actifs la passation en charges immédiate serait attribuée, et tout coût en capital excédentaire serait assujetti aux règles normales de la DPA. En outre, la passation en charges immédiate s’appliquerait en plus des autres déductions bonifiées dont bénéficient les SPCC en vertu des règles existantes.

Réduction de taux pour les fabricants de technologies à zéro émission

Le budget de 2021 propose de réduire les taux d’imposition sur le revenu des sociétés pour les fabricants admissibles de technologies à zéro émission. Plus précisément, un taux d’imposition réduit pourrait être appliqué au revenu admissible de fabrication et de transformation de technologies à zéro émission, soit un taux qui passerait de 15 % à 7,5 % pour le revenu imposé au taux général d’imposition des sociétés, et de 9 % à 4,5 % pour le revenu imposé au taux d’imposition des petites entreprises. Les contribuables dont le revenu est assujetti à la fois au taux général d’imposition des sociétés et au taux d’imposition des petites entreprises pourraient choisir de voir leur revenu admissible imposé soit au taux général réduit de 7,5 %, soit au taux réduit de 4,5 % pour les petites entreprises, à condition que leur revenu global, quel que soit le taux d’imposition, ne dépasse pas le plafond de 500 000 $ s’appliquant habituellement aux SPCC demandant la déduction accordée aux petites entreprises. Un contribuable n’aura droit aux taux d’imposition réduits que si au moins 10 % de son revenu brut provenant de toutes les entreprises actives exploitées au Canada proviennent d’activités admissibles.

Par « activités admissibles », on entend des activités de fabrication ou de transformation de technologies à zéro émission, comme la fabrication de matériel de conversion en énergie renouvelable (solaire, hydraulique ou éolienne, par exemple) ou la production de combustibles (granules de bois, diesel renouvelable ou biogaz, par exemple) à partir de déchets déterminés. Toutefois, les activités qui, en général, ne remplissent pas les conditions pour être considérées comme des activités de fabrication ou de transformation selon les règles concernant les DPA seront exclues de ces nouvelles mesures.

Le revenu admissible d’un contribuable sera généralement égal à son « revenu rajusté tiré d’une entreprise » multiplié par la proportion de ses coûts totaux de main-d’œuvre et de capital utilisés dans les activités admissibles. Les méthodes utilisées pour déterminer les coûts de main-d’œuvre et de capital seraient semblables pour l’essentiel à celles qui sont utilisées pour calculer les bénéfices tirés des activités de fabrication et de transformation selon les règles fiscales actuelles. Les intéressés ont jusqu’au 18 juin 2021 pour transmettre leurs commentaires sur la méthode d’attribution des coûts proposée.

Les taux d’imposition réduits s’appliqueraient aux années d’imposition commençant après 2021 et seraient progressivement éliminés à compter des années d’imposition commençant en 2029, jusqu’à être complètement éliminés pour les années d’imposition commençant après 2031. De plus, étant donné la nature temporaire des mesures, il est confirmé dans le budget de 2021 qu’aucune modification n’est proposée au régime actuel des crédits d’impôt pour dividendes à l’égard des dividendes déterminés et des dividendes non déterminés.

Déduction pour amortissement pour le matériel de production d’énergie propre

Selon le régime actuel de la DPA, les catégories d’actifs 43.1 et 43.2 prévoient des taux de DPA accélérée pour les investissements dans du matériel de production et de conservation d’énergie propre désigné. Pour soutenir davantage l’investissement dans les technologies propres, le budget de 2021 propose d’élargir les types d’actifs inclus dans les catégories 43.1 et 43.2 afin d’inclure, notamment, les biens destinés au stockage d’énergie hydroélectrique par pompage, le matériel de production d’électricité qui exploite l’énergie cinétique et les systèmes de chauffage solaire actif, qui ne sont que quelques-uns des types d’actifs maintenant admissibles aux taux de DPA accélérée.

Afin de s’assurer que les incitations fournies par les catégories d’actifs 43.1 et 43.2 demeurent conformes à ses objectifs environnementaux actuels, le gouvernement, dans le budget de 2021, a cherché à restreindre l’admissibilité de certains actifs actuellement admissibles aux taux de DPA accélérée. Par conséquent, les actifs qui consomment des combustibles fossiles (et, dans certains cas, des combustibles résiduaires) pour produire de l’énergie renouvelable, ou dont la moitié de l’apport total en énergie provient de combustibles fossiles, ne pourront plus être considérés comme des actifs de catégories 43.1 ou 43.2.

L’élargissement des types d’actifs inclus dans les catégories 43.1 et 43.2 s’appliquerait aux actifs acquis et prêts à être mis en service à compter de la date du budget, à condition de ne pas avoir été utilisés ou acquis afin d’être utilisés à quelque fin que ce soit avant cette date. Par contre, le retrait de certains actifs des catégories 43.1 et 43.2 ne s’appliquerait qu’aux actifs prêts à être mis en service après 2024.

Règles d’enregistrement et de révocation applicables aux organismes de bienfaisance

Le budget de 2021 propose des modifications qui faciliteraient la révocation immédiate par l’ARC de l’enregistrement d’un organisme de bienfaisance qui est inscrit comme entité terroriste en vertu du Code criminel. De plus, si un organisme de bienfaisance compte un administrateur, un fiduciaire, un dirigeant ou une partie contrôlante qui est membre d’une entité terroriste inscrite ou qui est également administrateur, fiduciaire, dirigeant ou partie contrôlante d’une entité terroriste inscrite, le ministre du Revenu national pourra, à sa discrétion, refuser ou révoquer son enregistrement, ou suspendre son autorisation à délivrer des reçus pour dons. De plus, le ministre sera en droit de révoquer l’enregistrement d’un organisme de bienfaisance, ou de suspendre son autorisation à délivrer des reçus, si celui-ci fait un faux énoncé dans des circonstances équivalant à une conduite coupable dans le but de maintenir (et non seulement dans le but d’obtenir, comme le prévoient les dispositions actuelles) son enregistrement.

Soutiens d’urgence aux entreprises

Le budget de 2021 propose de prolonger la SSUC, la SUCL et l’Indemnité de confinement jusqu’en septembre 2021 et de réduire graduellement les taux de ces mesures entre juillet et septembre.

Il propose également d’accorder au gouvernement l’autorité législative d’ajouter des périodes d’admissibilité supplémentaires, par voie de règlement, pour la SSUC, la SUCL et l’Indemnité de confinement jusqu’au 20 novembre 2021.

Subvention salariale d’urgence du Canada

Prolongation de la SSUC

La SSUC vise, de façon générale, à procurer aux employeurs admissibles qui ont connu une baisse de revenus durant la pandémie de COVID-19 une subvention salariale pour la rémunération admissible versée à leurs employés. Une description détaillée de la SSUC figure dans notre bulletin d’août 2020. Le taux maximum combiné de la subvention de base et de la subvention salariale complémentaire est fixé à 75 % pour la période d’admissibilité prenant fin le 5 juin 2021 (jusqu’à concurrence d’une prestation hebdomadaire maximale par employé de 847 $).

Le budget de 2021 propose de prolonger la SSUC jusqu’au 25 septembre 2021. Pour les périodes d’admissibilité commençant le 4 juillet 2021 ou plus tard, il propose de réduire progressivement le taux de la subvention salariale. Selon les règles proposées, la subvention maximale combinée (subventions de base et complémentaire) correspondrait à 60 %, à 40 % et à 20 % de la rémunération admissible pour les périodes d’admissibilité commençant le 4 juillet, le 1er août et le 29 août 2021, respectivement (jusqu’à concurrence d’une prestation hebdomadaire maximale par employé de 677 $, de 452 $ et de 226 $, respectivement). Toujours à compter du 4 juillet 2021, seuls les employeurs dont les revenus ont diminué de plus de 10 % seraient admissibles à la subvention salariale.

Obligation de rembourser la subvention salariale

Le budget de 2021 propose également d’obliger une société cotée en bourse – ainsi que les membres de son groupe – à rembourser les montants de subvention salariale reçus pour une période d’admissibilité commençant après le 5 juin 2021 si sa rémunération globale pour les dirigeants précisés au cours de l’année civile 2021 dépasse sa rémunération globale pour les dirigeants précisés au cours de l’année civile 2019. Pour l’application de cette règle proposée, les dirigeants précisés d’une société cotée en bourse seront les dirigeants dont la rémunération est tenue d’être déclarée en vertu des lois sur les valeurs mobilières du Canada ou les dirigeants équivalents dans le cas d’une société cotée en bourse dans un autre territoire. Ces dirigeants comprennent généralement le chef de la direction, le chef des finances et les trois autres dirigeants les mieux rémunérés.

Subvention d’urgence du Canada pour le loyer

De façon générale, la subvention pour le loyer vise à payer une partie du loyer commercial ou des frais immobiliers d’une entité admissible si les revenus de cette entité ont diminué durant la pandémie de COVID-19. Le taux maximal de la subvention de base est fixé à 65 % jusqu’à la fin de la période d’admissibilité se terminant le 5 juin 2021. Le budget de 2021 propose de prolonger la SUCL jusqu’au 25 septembre 2021, mais de réduire progressivement les taux de subvention à partir du 4 juillet 2021. De plus, à compter de cette même date, seules les entités dont les revenus ont diminué de plus de 10 % seraient admissibles à la subvention de base (et à l’Indemnité de confinement décrite ci-après).

Indemnité de confinement

Le gouvernement fédéral a établi l’Indemnité de confinement dans le cadre de la SUCL afin d’apporter un soutien supplémentaire aux emplacements devant cesser leurs activités ou les limiter considérablement à la suite d’une ordonnance de la santé publique fédérale, provinciale ou territoriale rendue en vertu d’une loi fédérale, provinciale ou territoriale. Pour avoir droit à l’Indemnité de confinement, le demandeur doit être admissible à la subvention pour le loyer de base. Voyez ci-dessus les changements apportés aux critères d’admissibilité à la subvention pour le loyer de base. Il est proposé dans le budget de 2021 de prolonger, pour les périodes d’admissibilité du 6 juin 2021 au 25 septembre 2021, l’Indemnité de confinement à son taux actuel de 25 %.

Programme d’embauche pour la relance économique du Canada

Le budget de 2021 propose le nouveau Programme d’embauche pour la relance économique du Canada afin d’offrir aux employeurs admissibles une subvention allant jusqu’à 50 % de la rémunération supplémentaire versée aux employés admissibles entre le 6 juin 2021 et le 20 novembre 2021. Un employeur admissible serait autorisé à demander soit la subvention à l’embauche, soit la subvention salariale pour une période d’admissibilité donnée, mais pas les deux.

Employeurs admissibles et employés admissibles

En général, les employeurs admissibles à la SSUC seraient admissibles à la subvention à l’embauche. Toutefois, une société à but lucratif ne serait admissible à la subvention à l’embauche que si elle est une SPCC. Les employeurs admissibles (ou leur fournisseur de services de paie) seraient tenus d’avoir eu un compte ouvert de retenues sur la paie auprès de l’ARC le 15 mars 2020.

Un employé admissible doit être au service d’un employeur admissible, principalement au Canada, de manière continue durant la période d’admissibilité (ou la partie de la période d’admissibilité pendant laquelle le particulier était au service de l’employeur admissible). La subvention à l’embauche ne serait pas offerte aux employés en congé payé.

Rémunération admissible et rémunération supplémentaire

Les types de rémunérations admissibles à la SSUC seraient également admissibles à la subvention à l’embauche. La rémunération supplémentaire pour une période d’admissibilité correspond à la différence entre le total de la rémunération admissible d’un employeur versée à des employés admissibles pour la période d’admissibilité et le total de sa rémunération admissible versée à des employés admissibles pour la période de rémunération de base (c’est-à-dire du 14 mars au 10 avril 2021). Pendant les deux périodes, la rémunération admissible pour chaque employé admissible serait assujettie à un montant maximal de 1 129 $ par semaine.

Seuil de la baisse des revenus et montant de la subvention

Pour être admissible à la subvention à l’embauche pour une période d’admissibilité, l’employeur admissible devrait avoir subi une baisse de revenus suffisante pour être admissible à la SSUC pour cette période d’admissibilité (la détermination serait faite de la même manière que pour la SSUC). En ce qui concerne les périodes d’admissibilité où la SSUC n’est plus en vigueur, l’employeur admissible devrait avoir subi une baisse de revenus supérieure à 10 %. Ainsi, la baisse des revenus de l’employeur admissible devrait être supérieure à :

  • 0 %, pour la période d’admissibilité du 6 juin au 3 juillet 2021
  • 10 %, pour les périodes d’admissibilité du 4 juillet au 20 novembre 2021.

La subvention d’un employeur admissible pour une période d’admissibilité serait égale à sa rémunération supplémentaire multipliée par le taux de subvention à l’embauche en vigueur pour cette période d’admissibilité, à condition que sa baisse de revenus dépasse le seuil de la baisse des revenus pour la période d’admissibilité. Les taux de subvention à l’embauche proposés sont les suivants :

  • 50 %, pour les périodes d’admissibilité du 6 juin au 28 août 2021
  • 40 %, pour la période d’admissibilité du 29 août au 25 septembre 2021
  • 30 %, pour la période d’admissibilité du 26 septembre au 23 octobre 2021
  • 20 %, pour la période d’admissibilité du 24 octobre au 20 novembre 2021.

Mesures visant la taxe d’accise

Application de la TPS/TVH au commerce électronique

L’Énoncé économique de l’automne 2020 a proposé des modifications détaillées au régime de la TPS/TVH visant le commerce électronique (les « propositions de 2020 »), que nous avons examinées dans notre bulletin de décembre 2020. Le budget de 2021 propose des changements aux propositions de 2020 qui tiennent compte des commentaires reçus des intéressés visant, notamment, la limitation de la responsabilité des exploitants de plateforme et la déduction des créances irrécouvrables.

Les propositions de 2020 exigent des exploitants de plateforme de distribution qu’ils perçoivent et versent la TPS/TVH relativement aux ventes de biens par des vendeurs non inscrits à des acheteurs canadiens. Le budget de 2021 propose deux règles visant à protéger les exploitants de plateforme, qui i) imposent une responsabilité solidaire à l’exploitant de plateforme et au fournisseur non résident pour la perception et le versement de la TPS/TVH applicable, si le fournisseur non résident lui fournit de faux renseignements; et ii) limitent la responsabilité de l’exploitant de plateforme si celui-ci s’est raisonnablement fié aux renseignements fournis par le fournisseur non résident.

De plus, les propositions de 2020 exigent des non-résidents qui n’ont pas de présence physique au Canada et qui vendent des produits ou des services numériques à des consommateurs canadiens qu’ils s’inscrivent aux fins de la TPS/TVH et qu’ils perçoivent et versent la taxe relativement à leurs ventes taxables à des consommateurs canadiens, mais ne leur donnent pas droit aux crédits de taxe sur les intrants. Le budget de 2021 propose, comme mesure compensatrice, de permettre aux non-résidents de déduire le montant de toute créance irrécouvrable de la TPS/TVH qu’ils doivent verser pour une période de déclaration.

Le budget de 2021 prévoit une période de transition de 12 mois suivant l’entrée en vigueur des propositions de 2020, le 1er juillet 2021, durant laquelle le gouvernement exercera son pouvoir discrétionnaire dans l’administration des nouvelles mesures, à condition que le non-résident ou l’exploitant de plateforme puisse démontrer qu’il a pris des mesures raisonnables pour se conformer aux nouvelles règles.

Taxe sur certains biens de luxe

Le budget de 2021 propose d’instaurer, à compter du 1er janvier 2022, une nouvelle taxe sur la vente au détail de voitures de luxe et d’aéronefs personnels à un prix supérieur à 100 000 $ et de bateaux à un prix supérieur à 250 000 $. Certaines exclusions s’appliquent dans chaque cas, notamment à l’égard de véhicules, d’aéronefs et de bateaux utilisés à des fins commerciales ou dans le secteur public. La taxe s’appliquerait généralement au point de vente final si le prix de vente final payé par le consommateur (excluant la TPS/TVH ou la taxe de vente provinciale) est supérieur au seuil applicable. Dans chaque cas, le montant de la taxe serait le moins élevé de 10 % de la valeur totale du bien de luxe ou 20 % de sa valeur supérieure au seuil applicable. La TPS/TVH s’appliquerait au prix incluant la taxe proposée.

1 L’autorisation d’interjeter appel devant la Cour suprême du Canada a été refusée le 18 février 2021.

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