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L’IRS adopte la version définitive de l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé applicable au GILTI

Auteurs : Peter Glicklich, Gregg M. Benson et Heath Martin

Le Département du Trésor des États-Unis et l’IRS ont publié la version définitive d’un règlement (le « Règlement définitif de 2020 ») permettant à certains actionnaires américains d’une société étrangère contrôlée (controlled foreign corporation, une « CFC ») de se soustraire à l’impôt applicable au revenu mondial à faible taux d’imposition tiré de biens incorporels (global intangible low-taxed income ou « GILTI ») des CFC en produisant un choix qui leur permet de se prévaloir de l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé. Les règles relatives au GILTI ont été instaurées en 2017 en application de la loi des États-Unis intitulée Tax Cuts and Jobs Act of 2017 (la « loi TCJA »). De manière générale, le GILTI correspond à la tranche du bénéfice d’une CFC qui excède un rendement déterminé sur les actifs étrangers de la CFC.

Le Règlement définitif de 2020, publié le 20 juillet 2020, est fondé sur le projet de règlement publié en 2019 par l’IRS (le « Règlement proposé de 2019 ») qui incluait une exception aux règles relatives au GILTI permettant d’en exclure le revenu assujetti à un taux d’imposition relativement élevé dans un pays étranger. Outre le Règlement définitif de 2020, l’IRS a publié un nouveau projet de règlement (le « Règlement proposé de 2020 ») ayant pour objet de modifier l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé qui s’applique au revenu de la sous-partie F (à savoir, le revenu d’une société étrangère) afin de l’harmoniser avec l’exception qui s’applique au GILTI dont le libellé a été arrêté dans le Règlement définitif de 2020.

GILTI

La loi TCJA a conservé (malgré quelques modifications) les règles de la sous-partie F selon lesquelles une personne des États-Unis (U.S. person) paie de l’impôt sur les gains réalisés par une société étrangère affiliée. Ainsi, selon les dispositions actuelles de la sous-partie F, un actionnaire des États-Unis (United States shareholder) paie de l’impôt sur certains gains, généralement passifs, d’une société étrangère (appelés le revenu de la sous-partie F) si des actionnaires des États-Unis détiennent plus de 50 % des droits de vote ou de la valeur rattachés aux actions de la société étrangère en question. Aux fins de la sous-partie F, un actionnaire des États-Unis s’entend d’une personne des États-Unis qui détient au moins 10 % des droits de vote ou de la valeur rattachés aux actions de la société étrangère. Une société étrangère détenue par de tels actionnaires est appelée une CFC.

Conformément à la sous-partie F, un actionnaire des États-Unis peut choisir d’exclure un élément du revenu de la sous-partie F de son revenu brut si l’élément en question est visé par l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé qui s’applique au revenu de la sous-partie F. L’exception s’applique à l’égard d’un élément de revenu qui est imposé dans un pays étranger selon un taux qui est supérieur à 90 % du taux d’imposition du revenu des sociétés le plus élevé des États-Unis (ce qui correspond actuellement à 18,9 %, puisque la loi TCJA a fait passer le taux d’imposition du revenu des sociétés à 21 %). Afin d’établir si l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé s’applique (y compris aux fins du Règlement définitif de 2020), le taux plancher tient compte non seulement du taux d’imposition déclaré du territoire étranger, mais également du taux d’imposition réellement appliqué à un élément de revenu dans ce territoire.

La loi TCJA a introduit un nouvel impôt sur la quote-part du GILTI gagné par une CFC qui revient à un actionnaire des États-Unis. Bien que les règles applicables au GILTI aient pour objectif de cibler le revenu assujetti à un faible taux d’imposition, dans leur formulation initiale, les règles portant sur le GILTI ne comprenaient aucune exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé de la nature de celle prévue à l’égard du revenu de la sous-partie F. Les actionnaires des États-Unis qui sont des sociétés (et certains actionnaires des États-Unis qui ont choisi d’être considérés comme des sociétés aux fins de l’impôt sur le revenu de la sous-partie F) ont plutôt droit à une déduction correspondant à 50 % de leur GILTI et à un crédit pour impôt étranger correspondant à 80 % de l’impôt étranger payé sur le GILTI. Compte tenu de ces déductions, un actionnaire des États-Unis ne paie généralement pas d’impôt sur le GILTI qui est assujetti à un impôt étranger selon un taux supérieur à 13,125 %. En outre, les gains d’une CFC considérés comme du revenu de la sous-partie F et les gains qui sont exclus du revenu de la sous-partie F aux termes de l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé qui s’applique au revenu de la sous-partie F sont exclus du GILTI.

Le Règlement proposé de 2019

Le Règlement proposé de 2019 prévoyait, à l’égard du GILTI, une exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé semblable à celle qui s’applique au revenu de la sous-partie F. L’exception prévue par le Règlement proposé de 2019 permet à un actionnaire de contrôle américain d’une CFC de choisir d’exclure le GILTI de son revenu brut, dans la mesure où le GILTI a été assujetti à un impôt sur le revenu étranger selon un taux qui est supérieur à 90 % du taux d’imposition des sociétés des États-Unis (soit le même taux de 18,9 %). Une fois fait, ce choix viserait, selon le règlement proposé, toutes les CFC sous contrôle commun des actionnaires de contrôle des États-Unis.

Fait à noter, le Règlement proposé de 2019 prévoyait que le calcul des taux d’imposition étrangers serait établi séparément à l’égard de chaque unité commerciale admissible (qualified business unit ou une « unité commerciale ») d’une CFC, ce qui aurait empêché cette dernière de combiner et de calculer globalement les revenus assujettis à un taux d’imposition moindre et les revenus assujettis à un taux d’imposition élevé, calcul plus favorable à l’application de l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé. De plus, le Règlement proposé de 2019 prévoyait les exigences suivantes : (i) le choix de l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé devait être fait par les actionnaires de contrôle américains de la CFC, (ii) ce choix devait lier tous les actionnaires des États-Unis de la CFC et (iii) le choix fait ou révoqué ne pouvait être fait ou révoqué de nouveau avant l’expiration d’un délai de 60 mois.

Les dispositions généralement favorables aux contribuables du Règlement proposé de 2019 devaient s’appliquer aux années d’imposition d’une CFC commençant à la date à laquelle les règles seraient adoptées sous forme de règlement final ou après cette date. Par conséquent, avant la publication du Règlement définitif de 2020, il était généralement impossible aux contribuables de se prévaloir de l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé qui s’applique au GILTI (sauf dans certaines situations où le revenu est exclu du revenu de la sous-partie F en raison de l’application de l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé qui s’applique au revenu de cette sous-partie).

Le Règlement définitif de 2020

Le Règlement définitif de 2020 a généralement repris le libellé de l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé applicable au GILTI qui figurait dans le Règlement proposé de 2019, sauf quelques modifications. Les règles de base prévoyant la possibilité de soustraire au régime du GILTI le revenu assujetti à un impôt étranger selon un taux qui est supérieur à 90 % du taux d’imposition du revenu des sociétés des États-Unis ont été conservées. Bien que certaines observations des contribuables aient été prises en considération, et que certaines aient été intégrées dans le Règlement définitif de 2020, bon nombre d’entre elles ont été rejetées parce que jugées trop complexes.

Les principaux points à retenir concernant le Règlement définitif de 2020 comprennent les suivants :

  • Unités déterminées. En ce qui concerne le calcul du taux de l’impôt étranger, le Règlement définitif de 2020 n’applique ni la méthode fondée sur chaque unité commerciale, que prévoyait le Règlement proposé de 2019, ni la méthode fondée sur chaque CFC préconisée par les contribuables et les commentateurs. Le taux d’imposition effectif du GILTI est plutôt établi séparément pour chaque unité déterminée (tested unit). En général, on entend par unité déterminée soit la CFC elle-même, soit une participation dans une entité intermédiaire détenue par la CFC, soit une succursale de la CFC. De plus, selon une nouvelle règle de regroupement, les unités déterminées d’une CFC qui sont situées dans le même pays étranger ou qui sont résidentes du même pays étranger doivent être considérées comme une seule et même unité déterminée.
  • Paiements non pris en compte. Le Règlement définitif de 2020 ajoute un niveau de complexité en ce qui concerne les paiements faits par une unité déterminée à une autre unité déterminée qui ne sont pas pris en compte aux fins de l’impôt des États-Unis, du fait qu’il prévoit que le revenu brut doit être réparti entre les unités déterminées afin d’assurer qu’il est associé à l’unité déterminée au sein de laquelle il est assujetti à l’impôt.
  • Choix annuel. Le Règlement définitif de 2020 élimine le délai d’attente de 60 mois au terme duquel les contribuables pouvaient révoquer le choix de l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé ou s’en prévaloir de nouveau; les contribuables pourront désormais faire ce choix annuellement.
  • Exigence d’uniformité. Sourd aux demandes des commentateurs qui préconisaient que le choix de l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé puisse être fait séparément pour chaque CFC, le Règlement définitif de 2020 maintient l’exigence d’uniformité voulant que le choix ou sa révocation s’applique à toutes les CFC liées.

Le Règlement proposé de 2020

À la suite de la publication du Règlement proposé de 2019, accueilli favorablement par les contribuables qui y trouvaient des dispositions permettant d’appliquer au GILTI l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé, nombreux ont été les fiscalistes qui ont demandé que cette exception soit modifiée de manière à l’harmoniser avec celle applicable au revenu de la sous-partie F. Bien que le Département du Trésor et l’IRS soient favorables à cette uniformisation, il a finalement été décidé que l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé prévue par le Règlement définitif de 2020 était plus en phase avec les politiques qui sous-tendent celle-ci que l’actuelle exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé applicable au revenu de la sous-partie F.

Par suite de cette décision, et afin de prévenir d’éventuelles planifications fiscales inappropriées et de réduire la complexité qu’entraîne une pluralité d’exceptions relatives au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé, le Règlement proposé de 2020 (i) modifie l’actuelle exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé applicable au revenu de la sous-partie F afin de l’harmoniser avec l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé applicable au GILTI prévue par le Règlement définitif de 2020 et (ii) instaure une procédure de choix unique à l’égard des exceptions applicables tant au GILTI qu’au revenu de la sous-partie F.

Entrée en vigueur

Le Règlement définitif de 2020 entre en vigueur, à l’égard des sociétés étrangères, pour les années d’imposition commençant le 23 juillet 2020 ou après cette date, et, à l’égard des actionnaires américains, pour les années d’imposition au cours desquelles ou auxquelles se terminent ces années d’imposition des sociétés étrangères. Bonne nouvelle quand même, les contribuables peuvent choisir d’appliquer le Règlement définitif de 2020 pour les années d’imposition commençant après le 31 décembre 2017 et avant le 23 juillet 2020, à condition que le règlement soit appliqué de façon uniforme à certains égards.

De manière générale, le Règlement proposé de 2020 est en vigueur pour les années d’imposition commençant à la date de l’adoption de sa version définitive et pour les années ultérieures.

Conclusion

L’ensemble de règlements publiés par l’IRS instaure des règles favorables aux contribuables en élargissant la portée de l’exception relative au revenu à taux d’imposition élevé, qui vise maintenant le GILTI en plus du revenu de la sous-partie F, ce qui devrait entraîner une réduction de l’impôt payable par les contribuables qui ont des participations dans des sociétés étrangères. Bien que les multinationales et les investisseurs internationaux accueilleront sûrement avec soulagement cette mesure d’allégement du régime applicable au GILTI, ils risquent d’être moins ravis de la décision des autorités de modifier l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé applicable au revenu de la sous-partie F afin de l’harmoniser avec les nouvelles règles applicables au GILTI prévues par le Règlement définitif de 2020, car cette modification entraînera des difficultés d’application auxquelles échappe actuellement l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé applicable au revenu de la sous-partie F.

Compte tenu de l’application rétroactive de l’exception relative au revenu assujetti à un taux d’imposition élevé applicable au GILTI dont peuvent se prévaloir les contribuables, dans certains cas pour les années d’imposition commençant après le 31 décembre 2017, les contribuables et leurs conseillers en fiscalité devraient évaluer s’ils peuvent bénéficier de l’application du Règlement définitif de 2020 à leurs années d’imposition antérieures.

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