Budget fédéral 2025
L’honorable François-Philippe Champagne, ministre des Finances et du Revenu national, a présenté le premier budget fédéral du Parti libéral établi sous la direction du premier ministre Mark Carney (le « Budget 2025 »). Le Budget 2025 ne prévoit aucun changement aux taux d’imposition des particuliers et des sociétés ou à l’impôt minimum de remplacement qui sont prévus dans la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR »).
Le Budget 2025 prévoit toutefois certaines mesures fiscales qui semblent destinées à améliorer la productivité du Canada et sa compétitivité à l’échelle internationale. Le Budget 2025 apporte également un certain nombre de modifications techniques à la LIR, annule la taxe sur les logements sous-utilisés et la « taxe de luxe » applicable aux aéronefs et aux navires, et confirme l’intention de mettre en œuvre plusieurs mesures annoncées précédemment, dont l’annulation de la taxe sur les services numériques.
Déductions pour amortissement accéléré
Le Budget 2025 prévoit un ensemble d’incitatifs fiscaux, baptisé « superdéduction à la productivité », qui permet des déductions accélérées pour certaines dépenses en capital, dont la passation en charges immédiate pour les nouveaux bâtiments servant à la fabrication et à la transformation acquis à compter du jour du budget, à condition qu’ils servent à la fabrication ou à la transformation avant 2030. Cette mesure sera éliminée progressivement de 2030 à 2033. En outre, au chapitre des incitatifs, les taux majorés de la déduction pour amortissement accéléré sont prolongés en ce qui concerne les équipements de gaz naturel liquéfié et les bâtiments connexes qui satisfont à certaines mesures de performance en matière d’émissions (qui doivent encore être annoncées).
La superdéduction à la productivité comprend également certaines mesures déjà annoncées, notamment les suivantes :
- le rétablissement de l’« incitatif à l’investissement accéléré », y compris une déduction bonifiée la première année pour certaines immobilisations;
- la passation en charges immédiate du coût du matériel de production d’énergie propre ou de conservation d’énergie et des véhicules à zéro émission;
- la passation en charges immédiate des brevets, de l’infrastructure de réseaux de données et des ordinateurs;
- la passation en charges immédiate des dépenses en capital pour la recherche scientifique et le développement expérimental.
Encouragements fiscaux pour la RS&DE
L’Énoncé économique de l’automne de 2024 proposait d’apporter un certain nombre de changements au régime d’encouragements fiscaux du Canada pour la recherche scientifique et le développement expérimental (la « RS&DE »), à savoir (i) faire passer de 3 millions de dollars à 4,5 millions de dollars la limite de dépenses auxquelles le crédit d’impôt remboursable bonifié de 35 % peut être appliqué; (ii) augmenter les plafonds de dépenses progressivement réduits aux fins du crédit d’impôt bonifié de 35 % pour les faire passer de 10 à 50 millions de dollars à 15 à 75 millions de dollars; (iii) permettre aux sociétés publiques canadiennes admissibles (en plus des sociétés privées sous contrôle canadien) de demander le crédit d’impôt bonifié de 35 %; et (iv) permettre de nouveau aux contribuables de demander le crédit d’impôt à l’investissement pour les dépenses en capital liées à la RS&DE et de déduire ces dépenses de leur revenu.
Le Budget 2025 réaffirme l’intention du gouvernement libéral de mettre en œuvre les modifications susmentionnées et prévoit une nouvelle augmentation de la limite des dépenses, qui passerait de 4,5 millions de dollars à 6 millions de dollars, pour les années d’imposition qui commencent le 16 décembre 2024 ou après, dans le but déclaré d’encourager les investissements dans l’innovation canadienne.
Le Budget 2025 propose également d’accroître la prévisibilité, la rapidité et la gestion du programme de RS&DE, à savoir (i) mettre en place un processus d’approbation préalable facultatif afin que les entreprises puissent obtenir une approbation technique préalable pour leurs projets de RS&DE admissibles, avant de commencer les travaux ou d’engager des dépenses; (ii) traiter les demandes à faible risque sans procéder à des vérifications inutiles en ayant recours à l’intelligence artificielle; et (iii) simplifier le processus d’examen en éliminant les étapes inutiles et en réduisant la complexité des renseignements exigés qui peuvent retarder la décision finale concernant les demandes. Ces améliorations devraient être mises en œuvre à compter du 1er avril 2026. D’autres améliorations à la gestion du programme de RS&DE, dont des révisions éventuelles du formulaire de demande pour les dépenses de RS&DE (le « Formulaire T661 »), devraient être mises en œuvre après la réalisation d’un processus de consultations ciblées.
Placements admissibles aux régimes enregistrés
Le budget fédéral 2024 prévoyait un examen des placements qui peuvent être détenus dans un REER, un CELI et d’autres régimes enregistrés. À la suite d’une consultation, le Budget 2025 prévoit plusieurs simplifications aux catégories de placements qui peuvent être détenus dans un REER, un CELI et d’autres régimes enregistrés, notamment des parts de fiducie conformes aux exigences prévues dans la Norme canadienne 81-102 (le Règlement 81-102 au Québec) et les parts de fiducies classées comme un fonds de placement (au sens attribué à ce terme dans les règles fiscales en vigueur) et gérées par un gestionnaire de fonds de placement inscrit, comme le décrit la Norme canadienne 31-103 (le Règlement 31-103 au Québec), toutes deux publiées par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières.
Revenu étranger accumulé, tiré de biens (le « REATB ») et risques d’assurance canadiens
Le Budget prévoit la modification des règles applicables aux sociétés étrangères affiliées des assureurs canadiens afin de préciser que les revenus de placements provenant d’actifs détenus par des sociétés affiliées étrangères couvrant certains risques d’assurance canadiens sont inclus dans le REATB de ces sociétés affiliées étrangères.
Règle des 21 ans en matière de planification des fiducies
Le Budget 2025 propose d’étendre l’application de la règle anti évitement énoncée au paragraphe 104(5.8) de la LIR pour remédier aux failles perçues en lien avec les transferts indirects d’une fiducie à d’autres fiducies avant la date de disposition réputée des 21 ans. La règle s’appliquera dorénavant, par exemple, à la distribution faite par une fiducie à une société appartenant à une autre fiducie, qui pourrait autrement reporter la date de disposition réputée de 21 autres années. La mesure proposée s’appliquerait aux transferts effectués à compter du jour du budget.
Impôt de la Partie IV
Le Budget 2025 propose de modifier la LIR pour empêcher les sociétés privées de reporter l’impôt prévu à la Partie IV sur le revenu de placement au moyen de paliers de sociétés dont les fins d’exercice sont décalées.
Prix de transfert
À l’issue d’un long processus de consultation annoncé à l’origine dans le budget fédéral de 2021, le Budget 2025 propose de « moderniser les règles du Canada en matière de prix de transfert afin qu’elles s’harmonisent davantage avec le consensus international sur l’application du principe de pleine concurrence ». Les modifications qu’il est proposé d’apporter aux règles sur les prix de transfert énoncées à l’article 247 de la LIR fourniraient plus de précisions sur les caractéristiques économiquement pertinentes (plutôt qu’à la forme juridique) aux fins de la comparaison d’une opération ou d’une série d’opérations à une opération hypothétique conclue sans lien de dépendance. Le Budget 2025 modifie également certaines mesures administratives liées aux règles sur les prix de transfert, y compris en haussant le seuil d’application de la pénalité de prix de transfert pour le porter de 5 millions de dollars à 10 millions de dollars et en révisant les exigences en matière de documentation ponctuelle.
Encouragements fiscaux liés aux technologies propres et aux minéraux critiques
Le Budget 2025 propose certains rehaussements et élargissements des encouragements fiscaux existants liés aux technologies propres et aux minéraux critiques, à savoir le crédit d’impôt pour l’exploration de minéraux critiques, le crédit d’impôt à l’investissement pour la fabrication de technologies propres, le crédit d’impôt à l’investissement pour le captage, l’utilisation et le stockage du carbone et le crédit d’impôt à l’investissement dans l’électricité propre.
Incitatif aux entrepreneurs canadiens
Le Budget 2025 semble confirmer l’intention du gouvernement fédéral d’annuler l’incitatif aux entrepreneurs canadiens qui avait été proposé dans le budget de 2024.
Élimination de la taxe sur les logements sous-utilisés
Dans le Budget 2025, le gouvernement propose d’éliminer à compter de l’année civile 2025 la taxe de 1 % sur les logements sous-utilisés. Cette décision semble motivée par l’opinion du gouvernement selon laquelle la taxe est devenue inutile en raison des mesures similaires mises en place par d’autres ordres de gouvernement, de l’interdiction d’achat de logements par des étrangers et de la volonté du gouvernement de réduire les coûts de conformité pour les contribuables et les frais administratifs pour le gouvernement.
Élimination de la taxe de luxe sur les aéronefs et les navires
Dans le budget 2025, le gouvernement propose d’éliminer la « taxe de luxe » sur les aéronefs et les navires, à compter du lendemain du dépôt du budget, pour offrir un allègement au secteur de l’aviation et à l’industrie nautique. Il semble que la taxe de luxe continuera de s’appliquer à d’autres véhicules.
Instauration d’un mécanisme de versement inversé (MVI) de la TPS et de la TVH pour certaines fournitures
Afin de lutter contre la fraude sous le régime de la TPS et de la TVH, le Budget 2025 propose un nouveau « mécanisme de versement inversé » qui obligera les personnes inscrites à la TPS et à la TVH à s’autocotiser lorsque certaines fournitures seront acquises aux fins de revente. Le mécanisme s’appliquera initialement à certains services de télécommunications, y compris à la fourniture de minutes de voix par le protocole de l’internet (VoIP), mais pourrait s’étendre à d’autres éléments dans l’avenir.
Déclaration des simples fiducies
Le Budget 2025 annonce que la date d’application différée des règles proposées pour la déclaration des « simples fiducies » s’appliquera aux années d’imposition se terminant le 31 décembre 2026 ou après.
Adoption de l’IA par l’Agence du revenu du Canada (ARC)
Le Budget 2025 présente un examen exhaustif des dépenses du gouvernement fédéral devant permettre des économies opérationnelles de 15 % dans l’ensemble des ministères, y compris à l’ARC. Toutefois, le Budget 2025 ne propose pas de changement important au budget de l’ARC concernant l’impôt sur le revenu ou la TPS et la TVH. Il y est plutôt indiqué que l’ARC prévoit réaliser des économies de fonctionnement en éliminant les unités opérationnelles qui administraient la taxe sur les logements sous utilisés, la « taxe de luxe » sur les aéronefs et les navires et la taxe sur les services numériques. L’ARC se propose d’affecter environ 500 millions de dollars au cours des cinq prochaines années aux technologies d’IA pour automatiser certains processus internes. On ignore comment l’ARC intégrera l’IA et si ces changements viendront remédier aux critiques récentes de la vérificatrice générale du Canada concernant la lenteur des réponses et l’inexactitude et les lacunes des renseignements fournis par les centres d’appels et les actuels agents conversationnels basés sur l’IA de l’ARC.
L’examen des dépenses effectué par le ministère de la Justice indique que celui‑ci étudiera l’opportunité d’étendre l’accès à la procédure informelle dans certaines affaires concernant l’impôt sur le revenu et la TPS et la TVH afin de réduire les coûts pour le ministère et pour les contribuables.



