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Mesures fiscales de représailles : Un projet de loi en cours d’examen par le Congrès américain pourrait avoir une incidence défavorable sur le rendement des investissements étrangers

20 juin 2025

Répercussions de la réforme sur les investisseurs internationaux et les entreprises multinationales

Alors que le processus de réforme fiscale se poursuit aux États-Unis, le projet de loi tous azimuts qui a été adopté par la Chambre des représentants (la « Chambre ») en mai dernier fait maintenant l’objet d’un examen attentif par le Sénat. Plus tôt cette semaine, le Comité sénatorial des finances a publié sa propre version du projet de loi, qui sera débattue au Sénat. Les deux projets de loi proposent la modification en profondeur de plusieurs dispositions fiscales internationales et l’adoption d’un nouveau régime de représailles ciblant les impôts étrangers injustes. Sont présentées dans ce bulletin certaines des modifications qu’il est proposé d’apporter, avant qu’elles ne deviennent loi.

Article 899 : Mesures de représailles contre les « impôts étrangers injustes »

La version proposée de l’article 899 demeure au cœur des préoccupations des entités et des particuliers étrangers qui investissent aux États-Unis. Cette disposition vise les pays (appelés « pays étrangers contrevenants ») qui ont établi des «  impôts étrangers injustes », au nombre desquels on compte les taxes sur les services numériques (TSN), la règle relative aux profits insuffisamment imposés (RPII), l’impôt sur les bénéfices détournés (IBD) et d’autres mesures qui, de l’avis du Trésor américain, ont une incidence disproportionnée sur les personnes des États-Unis.

Les principales caractéristiques de l’article 899 sont les suivantes :

  • Des taux d’imposition américains accrus seraient appliqués aux résidents d’un pays étranger contrevenant. Le projet de loi du Sénat ne prévoit l’application des taux majorés que dans le cas où le pays applique des mesures fiscales « extraterritoriales » (tels que la RPII et l’IBD). Le Trésor se verrait accorder le pouvoir de repérer et de désigner d’autres impôts étrangers discriminatoires en fonction de critères prévus par la loi.
  • Les avantages prévus à l’article 892 seraient refusés aux gouvernements des pays étrangers contrevenants et des règles relatives à l’impôt anti-abus contre l’érosion de l’assiette fiscale (base erosion and anti-abuse tax ou BEAT) (l’« impôt BEAT ») élargies seraient appliquées aux sociétés américaines qui appartiennent à des résidents de ces pays.
  • Selon le projet de loi de la Chambre, l’article 899 pourrait s’appliquer dès le 1er janvier 2026, mais le projet de loi du Sénat en retarderait l’entrée en vigueur afin qu’il ne s’applique qu’aux années d’imposition commençant au plus tôt un an après la promulgation du projet de loi (ce qui correspondrait au 1er janvier 2027 pour les contribuables qui calculent et déclarent leurs obligations fiscales en fonction de l’année civile).
  • Le projet de loi de la Chambre introduirait progressivement une augmentation du taux d’imposition de 5 % par an, jusqu’à concurrence de 20 % par rapport au taux actuel prévu par la loi, tandis que l’augmentation du taux prévue par le projet de loi du Sénat serait plafonnée à 15 % au-dessus du taux normalement applicable (ce qui comprend un taux réduit en vertu d’une convention fiscale ou un taux de 0 %). Par exemple, le taux d’imposition maximum d’un dividende assujetti à un taux réduit de 15 % aux termes d’une convention fiscale pourrait atteindre 50 % selon le projet de loi de la Chambre, mais seulement 30 % selon le projet de loi du Sénat.
  • Le projet de loi du Sénat contient des dispositions générales concernant l’application des taux majorés à des impôts qui n’auraient pas par ailleurs à être payés en raison d’une exonération ou d’une exception, ou à des impôts dont le taux est égal à zéro. De plus, selon les rapports du Congrès, l’article 899 vise à supplanter les conventions fiscales, mais il est difficile de savoir si les taux majorés s’appliqueraient à certaines dispositions qui ont l’effet d’une exonération tout en étant régies par des mécanismes plus complexes (par exemple, les fonds de pension étrangers admissibles ne sont pas traités à titre de personnes étrangères pour l’application de la loi FIRPTA, bien qu’ils ne soient pas dispensés directement de l’application de la loi FIRPTA).
  • Toutefois, tout comme le faisait le projet de loi de la Chambre, le projet de loi du Sénat exclut explicitement du champ d’application des taux majorés l’exonération de l’intérêt tiré d’un portefeuille et certaines autres exonérations prévues par la loi.

Autres dispositions internationales visées par les projets de loi

Outre les mesures prévues par l’article 899, les projets de loi apportent d’importantes modifications à d’autres règles fiscales internationales :

  • les projets de loi de la Chambre et du Sénat modifieraient tous deux l’impôt BEAT, le régime relatif aux revenus mondiaux provenant d’actifs incorporels faiblement imposés (la taxe « GILTI ») et la déduction au titre du revenu de provenance étrangère tiré de biens incorporels (foreign derived intangible income ou le « revenu FDII »), mais le projet de loi du Sénat propose des changements plus importants, notamment des ajustements fondamentaux aux déductions au titre de la taxe GILTI et du revenu FDII, des règles de répartition des dépenses et un taux d’impôt BEAT majoré;
  • le projet de loi du Sénat rétablirait la restriction relative à l’attribution descendante (downward attribution) de la propriété des actions utilisée pour déterminer si une société est une société étrangère contrôlée (une « SEC »), une « rectification » attendue depuis longtemps qui devrait permettre à de nombreux groupes multinationaux de respecter plus facilement leurs obligations fiscales.

Prochaines étapes

Le processus législatif demeure fluide, et le Sénat et la Chambre devraient aplanir les différences dans leurs projets de loi respectifs avant leur adoption définitive. L’objectif actuel est de faire en sorte que le président signe le projet de loi final d’ici le 4 juillet. 

Nous suivons de près le processus et fournirons de plus amples renseignements au sujet des nouvelles règles lorsque nous aurons accès à leur version définitive.

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