Bulletin

La SIERE publie le rapport sur l’examen des contrats de production d’électricité exigé par une directive gouvernementale

L’automne dernier, le ministère de l’Énergie, du Développement du Nord et des Mines de l’Ontario a exigé de la Société indépendante d’exploitation du réseau d’électricité (« SIERE ») qu’elle retienne les services d’un tiers indépendant pour réaliser un examen ciblé des contrats de production d’électricité actuels de la province (voir à ce sujet notre bulletin du 8 novembre 2019). L’objectif avoué de l’examen était de « cerner les occasions de réduire les coûts de l’électricité à même ces contrats de production ». La directive donnée par le ministère exigeait que la SIERE produise le rapport, accompagné de son évaluation des conclusions du rapport, au plus tard le 28 février 2020.

Le rapport du tiers et son évaluation par la SIERE ont été publiés la semaine dernière et sont disponibles (en anglais) sur le site Web de la SIERE. La directive stipulait que l’examen devait cibler les grands contrats de production à partir de gaz, d’énergie éolienne et d’énergie solaire arrivant à échéance au cours des dix prochaines années; toutefois, la SIERE note dans son évaluation que ces contrats représentent seulement [traduction] « environ 1 milliard de dollars, soit 5 % des coûts annuels totaux du réseau d’électricité de l’Ontario ». Par conséquent, l’examen a porté sur l’ensemble des grands contrats, à l’exception de l’accord de remise en état de la centrale de Bruce qui, selon la SIERE, [traduction] « représente environ 7 milliards de dollars, soit 32 % des coûts annuels totaux du réseau d’électricité de l’Ontario ».

Comme on pouvait s’y attendre, l’examen effectué n’a repéré aucune économie potentielle qui pourrait être réalisée selon les modalités des contrats actuels. Comme nous l’avions mentionné dans notre bulletin précédent, le gouvernement a annoncé, en juin 2018, l’annulation de 758 contrats de production d’électricité à partir d’énergies renouvelables. Les contrats annulés contenaient tous des dispositions permettant leur résiliation (sous réserve du paiement des frais de résiliation prescrits) avant l’atteinte de certaines étapes. Cependant, en général, en l’absence d’un manquement au contrat, les droits de résiliation ne s’appliquent pas une fois qu’un projet a atteint les étapes précisées. La plupart, sinon la totalité, des contrats de production d’électricité ayant été l’objet de l’examen ont atteint toutes les étapes applicables et, par conséquent, en l’absence d’un manquement, aucun droit contractuel de résiliation n’existe à l’égard de ces contrats. Comme la SIERE le précise elle-même dans son évaluation du rapport, [traduction] « les contrats de production d’électricité de la SIERE ne lui confèrent pas de droits de résiliation pour des motifs de commodité une fois que l’installation a atteint le stade de l’exploitation commerciale ». La SIERE indique également que la probabilité que les contrats actuels soient résiliés en raison d’un manquement après l’atteinte de l’étape de l’exploitation commerciale est faible, étant donné que [traduction] « les obligations du producteur contractant pendant la durée d’exploitation peuvent, en général, être facilement respectées par tout producteur prudent ».

Le rapport étudie diverses possibilités de réaliser des économies dans le cadre des contrats actuels et les classe en trois catégories : « principales », « secondaires » ou « non significatives ». Les possibilités principales décrites sont : le rachat global du contrat (contract buyout) (la SIERE verse au fournisseur une somme forfaitaire en échange de l’acceptation par celui-ci de résilier le contrat); la réduction du prix du contrat (contract buydown) (la SIERE verse au fournisseur une somme forfaitaire en échange de l’acceptation par celui-ci d’un prix inférieur à celui qui est prévu par le contrat); et la prolongation à un prix inférieur au prix initial (blend and extend) (la SIERE et le fournisseur conviennent de prolonger la durée du contrat à un prix inférieur au prix initial prévu). Les possibilités secondaires nécessitent l’apport de modifications précises aux contrats et l’utilisation de crédits d’énergie renouvelable. Toutefois, à cet égard, les auteurs du rapport constatent dans leur conclusion que la possibilité que des modifications précises aux contrats permettent de réaliser des économies de coûts importantes est sans doute faible, et que la possibilité de réaliser des économies de coûts au moyen de crédits d’énergie renouvelable est limitée. Par conséquent, ils n’étudient pas en détail ces possibilités.

Une analyse très poussée des possibilités principales susmentionnées est présentée dans le rapport. Même si les auteurs du rapport arrivent à la conclusion que des économies de coûts potentielles pourraient résulter de chacune de ces possibilités, ils mentionnent également un certain nombre de risques (relatifs à la fiabilité, à la planification et aux questions financières) et d’incertitudes associés à chacune d’elles.

Dans son évaluation du rapport, la SIERE signale que toute économie pouvant être réalisée au moyen de l’option de rachat global du contrat ou de l’option de réduction du prix du contrat suppose l’emprunt par la SIERE de sommes importantes pour financer les paiements requis (dont les coûts sont supportés par le contribuable), à un coût de financement inférieur à celui qu’avait obtenu le fournisseur. Cependant, étant donné que bon nombre des projets existants sont financés par un emprunt à long terme sans recours, le consentement du prêteur serait nécessaire et, comme la SIERE le souligne à juste titre, [traduction] « la résiliation des contrats de prêt existants entraînerait vraisemblablement des coûts considérables ».

La SIERE mentionne également dans son évaluation que l’option de prolongation à un prix inférieur au prix initial soulève non seulement la question du consentement du prêteur et des coûts de résiliation possibles, mais aussi la probabilité que, même si les contribuables voient leurs coûts diminuer à court terme, ils finissent par payer davantage sur la durée du contrat prolongé. Les coûts accrus seraient dus au fait que les taux d’actualisation utilisés par le fournisseur sont plus élevés que ceux qu’emploie la SIERE, de sorte que le fournisseur accordera une plus grande valeur au prix réduit sur la prolongation du contrat et une valeur moindre aux produits d’exploitation futurs supplémentaires réalisés durant la prolongation du contrat (c’est-à-dire que le fournisseur exigera un paiement forfaitaire plus élevé en contrepartie des produits d’exploitation dont il s’estimera privé). La SIERE conclut donc que l’option de prolongation à un prix inférieur au prix initial n’est vraisemblablement une option viable que pour les contrats dont l’échéance approche, à l’égard desquels il est possible que le fournisseur soit enclin à rehausser la valeur qu’il accorde à des produits d’exploitation futurs garantis.

Il reste à voir quelles mesures seront prises, le cas échéant, à la suite du rapport et de l’évaluation de la SIERE. Comme ils l’indiquent tous deux, la solution facile (c’est-à-dire la résiliation des 758 contrats) a déjà été appliquée et il reste peu de possibilités d’économies rattachées aux contrats de production actuels. L’option de réduction du prix du contrat se distingue comme celle qui offre le plus grand potentiel d’économies, mais sa mise en œuvre comporte de nombreuses difficultés. De plus, comme la SIERE le fait remarquer dans son évaluation, celle-ci a déjà [traduction] « recherché activement et employé des moyens de rehausser l’efficacité et de réaliser des économies en lien avec ses contrats, y compris les contrats visant des installations qui sont en cours d’aménagement et d’autres qui sont déjà exploitées commercialement ». La SIERE souligne également dans son évaluation que son Programme de renouvellement du marché devrait rehausser l’efficacité du marché de l’électricité de l’Ontario et pourrait entraîner des économies importantes.

Ce qui est clair, cependant, c’est que la mise en place de toute mesure efficace de réduction des coûts nécessitera de la part de la SIERE une collaboration avec les producteurs et non pas une action unilatérale. La possibilité pour la SIERE de conclure un accord avec un producteur donné dépendra des faits associés à l’installation en question. Il faudra donc analyser les projets individuellement plutôt que de chercher une solution unique.

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