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Abolition du régime des immobilisations admissibles : dernière occasion pour les entrepreneurs canadiens

Auteurs : Michael N. Kandev, Brian Bloom, Reuben Abitbol et John J. Lennard

Dans le cadre du budget fédéral déposé le 22 mars 2016, le ministre des Finances du Canada, Bill Morneau, a annoncé l’abolition, en date du 1er janvier 2017, du régime des immobilisations admissibles (les « IA ») et son intégration aux règles existantes concernant les biens amortissables. Bien que les nouvelles règles prévoient des déductions analogues à celles qui sont offertes aux termes du régime des IA actuel et qu’elles simplifient le système en place, la modification aura une incidence considérable pour les entrepreneurs canadiens qui procéderont à la vente de leur entreprise. L’incidence de cette modification sera d’autant plus importante pour les entrepreneurs qui exploitent leur entreprise par le truchement d’une société privée sous contrôle canadien (une « SPCC »). Les SPCC sont, essentiellement, des sociétés privées canadiennes qui ne sont pas contrôlées par des non-résidents et/ou des sociétés ouvertes.

Font notamment partie des IA l’achalandage et les autres biens incorporels qui ne font pas partie d’une catégorie distincte de biens amortissables, comme les marques de commerce, les listes de clients et certaines licences.

En somme, en vertu du régime des IA actuel, 75 % des dépenses en capital admissibles sont incluses dans le montant cumulatif des immobilisations admissibles (les « MCIA »). Une déduction peut être réclamée au taux de 7 % par année selon la méthode de l’amortissement dégressif. En vertu des règles proposées, la totalité des dépenses engagées à compter du 1er janvier 2017 qui auraient été auparavant incluses dans les MCIA seront incluses dans une nouvelle catégorie de biens amortissables (la « catégorie 14.1 »). Le taux d’amortissement pour les dépenses engagées à compter du 1er janvier 2017 s’établira à 5 % suivant la méthode de l’amortissement dégressif. Le solde des MCIA sera transféré dans la catégorie 14.1 au 1er janvier 2017. Aux fins de la déduction pour amortissement, le taux d’amortissement pour les dépenses engagées avant le 1er janvier 2017 et transférées à la catégorie 14.1 s’établira à 7 % jusqu’en 2027.

Cela étant dit, la conséquence la plus importante de ces modifications réside dans le fait qu’un gain réalisé à la vente des IA sera dorénavant imposé comme un gain en capital et assujetti au mécanisme de l’impôt remboursable applicable au revenu de placement réalisé par une SPCC.

En vertu des règles fiscales actuelles, la moitié du gain réalisé à la disposition des IA est imposable selon le faible taux d’imposition des sociétés, alors que l’autre moitié de ce gain est portée au compte de dividendes en capital de la SPCC et peut être versée en franchise d’impôt aux différents actionnaires. Ainsi, le taux d’imposition effectif applicable au gain sur l’achalandage que réaliserait une SPCC ayant un établissement au Québec par suite de la vente de son entreprise serait de 13,45 %, alors que ce taux serait de 13,25 % si la SPCC avait un établissement en Ontario. Ce taux d’imposition effectif très bas offre une occasion de report d’impôt appréciable pour ce qui est de la tranche du gain qui est imposable si celle-ci demeure dans les coffres de la SPCA.

En vertu du nouveau régime, les gains réalisés à la vente des IA seront imposés comme des gains en capital ordinaires et, par conséquent, assujettis au taux d’imposition plus élevé applicable au revenu de placement réalisé par une SPCC (par opposition au taux d’imposition qui est applicable au revenu d’entreprise). Ainsi, le taux d’imposition applicable à la moitié de ce gain serait de 50,6 % au Québec et de 50,1 % en Ontario, ce qui donnerait lieu à un taux d’imposition des sociétés effectif d’environ 25 % (soit un montant à payer au titre de l’impôt des sociétés presque deux fois plus élevé qu’aux termes du régime des IA actuel). Les SPCC qui versent des dividendes imposables à des particuliers peuvent obtenir le remboursement d’une partie de l’impôt payé à ce titre. Par conséquent, en vertu du nouveau régime, les SPCC ne pourront plus profiter de la possibilité de report d’impôt appréciable que leur offre le régime actuel.

Puisque les modifications proposées s’appliqueront à compter du 1er janvier 2017, le reste de l’année 2016 constitue la dernière occasion, pour les entrepreneurs canadiens, de vendre les entreprises qu’ils exploitent par le truchement d’une SPCC dans le cadre d’une vente d’actifs, ou d’une opération qui comporte à la fois une vente d’actifs et une vente d’actions (hybride), grâce à laquelle les actionnaires de la SPCC peuvent à la fois se prévaloir de l’exonération cumulative des gains en capital et bénéficier des possibilités de report d’impôt qui sont mises à leur disposition en vertu du régime des IA actuel. Dans certaines circonstances, il pourrait être avantageux pour les propriétaires de SPCC détenant des IA (qu’il s’agisse de l’achalandage ou d’un élément particulier comme une marque de commerce) dont le gain accumulé est important d’envisager la possibilité de cristalliser ce gain avant la fin de l’année dans le cadre d’une restructuration d’entreprise. Bien qu’on ne puisse déterminer avec certitude si la cristallisation en vaut la peine compte tenu de son impact fiscal, si l’opération est bien planifiée, une telle détermination pourrait ne pas être nécessaire avant plusieurs années, soit jusqu’à ce que l’on puisse déterminer avec plus de certitude si la cristallisation des gains réalisés sur les IA est réellement avantageuse ou pas.

Pour obtenir de plus amples renseignements sur ce sujet, veuillez consulter la communication sur le budget 2016 que nous avons déjà publiée.

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