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Lever de rideau sur le marché du carbone de l’Ontario

Auteurs : Sarah V. Powell et Alexandria J. Pike

Après de nombreuses années de réflexion, le gouvernement de l’Ontario a déposé le projet de loi 172, intitulé Loi de 2016 sur l’atténuation du changement climatique et une économie sobre en carbone, et publié un projet de règlement concernant le programme de plafonnement et d’échange de droits d’émission de gaz à effet de serre de l’Ontario. Ces mesures constituent un premier pas vers l’adhésion de l’Ontario au marché du carbone Québec–Californie.

Le régime de réglementation de l’Ontario établit les objectifs que la province cherche à atteindre en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre et prévoit l’obligation, pour les émetteurs réglementés, de prendre des mesures concrètes pour réduire leurs émissions ou de participer au marché du carbone. Cette obligation s’appliquera aux entreprises des secteurs d’activité qui émettent annuellement plus de 25 000 tonnes d’équivalent de dioxyde de carbone (CO2) ainsi qu’aux entreprises d’importation d’électricité et de distribution de gaz naturel et de pétrole. Les obligations de conformité à la réglementation s’appliqueraient à compter de 2017 et, dans un premier temps, jusqu’au 31 décembre 2020. Les entreprises réglementées recevraient initialement un nombre de droits d’émission de gaz à effet de serre gratuits suffisant pour couvrir leurs émissions actuelles, mais elles seraient graduellement tenues de réduire leurs émissions, d’acheter des droits d’émission auprès du gouvernement ou de se procurer des droits d’émission ou des crédits sur le marché du carbone.

Le régime de réglementation de l’Ontario est fondé sur le modèle établi par la Western Climate Initiative, de sorte que la province pourrait facilement lier son régime à ceux des autres participants à cette initiative, comme le Québec et la Californie. Comme c’est le cas dans ces territoires, les émetteurs réglementés pourraient obtenir des crédits compensatoires en réduisant de façon volontaire leurs émissions dans des secteurs autres que celui qui est réglementé et utiliser ces crédits pour couvrir jusqu’à 8 % des droits d’émission dont ils ont besoin pour se conformer à la réglementation. Le gouvernement de l’Ontario publiera plus tard cette année un règlement distinct concernant le programme de crédits compensatoires, mais on s’attend à ce que l’Ontario emboîte le pas au Québec et à la Californie et convienne que les émetteurs qui réduiront les émissions produites par l’utilisation de protocoles faisant appel à des substances telles que le méthane, le gaz d’enfouissement et les substances qui appauvrissent la couche d’ozone pourraient obtenir des crédits compensatoires. Le régime de réglementation de l’Ontario prévoit que le prix plancher dans le cas des ventes aux enchères sera de 14 $ CA la tonne en 2017, alors que la tonne s’est vendue 17,64 $ CA lors de la plus récente vente aux enchères sur le marché du carbone Québec-Californie.

L’échange de droits d’émission de gaz à effet de serre devrait permettre au gouvernement de l’Ontario d’engranger une somme d’environ 1,9 milliard de dollars canadiens en 2017, qui devrait être affectée au financement d’initiatives liées, notamment, à des sources d’énergie renouvelable et d’énergie de remplacement, au transport et aux infrastructures, aux technologies de gestion de l’énergie et au développement de technologies à faible taux d’émission.

L’annonce du gouvernement de l’Ontario arrive au moment où les premiers ministres s’apprêtent à se réunir le 3 mars 2016 pour jeter les assises d’une stratégie nationale de lutte contre les changements climatiques. Cette stratégie vise à permettre au Canada de se fixer de nouveaux objectifs afin de respecter les engagements pris dans le cadre de l’Accord de Paris, qui a pour objectif de limiter le réchauffement climatique à 2 degrés Celsius et, éventuellement, à 1,5 degré Celsius au-dessus des niveaux préindustriels. Compte tenu de ses prévisions peu réjouissantes concernant les émissions de gaz à effet de serre et du manque d’homogénéité des approches provinciales, le gouvernement fédéral aura vraisemblablement beaucoup de difficulté à établir une norme nationale pour la tarification du carbone.

La période de consultation sur le projet de loi 172 se poursuit jusqu’au 25 mars 2016 et celle sur le projet de règlement, jusqu’au 10 avril 2016.

Pour de plus amples renseignements sur ce sujet, consultez nos publications intitulées L’Ontario et le Québec feront équipe pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et Prix du carbone : Les mesures provinciales à l’aube de la Conférence de Paris sur les changements climatiques.

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