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L’IRS publie de nouveaux règlements musclés pour contrer les opérations d’inversion

Auteurs : Peter Glicklich et Heath Martin

Le Département du Trésor des États-Unis et l’Internal Revenue Service (IRS) ont récemment haussé d’un cran leur lutte contre les opérations d’inversion en prenant plusieurs nouveaux règlements provisoires en application de l’article 7874 de l’Internal Revenue Code. Les nouvelles règles auront une incidence sur les transactions en cours, y compris celles qui ont déjà été annoncées, et limiteront la manière dont les transactions à venir pourront être structurées. De façon générale, les nouvelles règles intègrent les lignes directrices énoncées précédemment dans la Notice 2014-52 (l’avis de 2014) et la Notice 2015-79 (l’avis de 2015) et ajoutent une nouvelle restriction à l’égard des inversions multiples réalisées à l’intérieur d’une courte période de temps.

Les nouvelles règles limitent les opérations d’inversion de façon beaucoup plus vigoureuse que ne le faisaient les anciennes règles, probablement en raison des pressions exercées par le Congrès et l’administration Obama pour empêcher les entreprises américaines de se relocaliser à l’étranger dans le but de payer moins d’impôt aux États-Unis. Cependant, plusieurs se demandent si le Département du Trésor n’outrepasse pas ses pouvoirs en procédant à l’adoption de ces nouvelles dispositions.

Les nouvelles dispositions devraient entrer en vigueur au moment de leur publication dans le Federal Register, prévue pour le 8 avril 2016.

Sommaire des règles applicables aux inversions

L’article 7874 s’applique généralement à l’acquisition d’une entité américaine par une société étrangère lorsque, après l’acquisition, les anciens propriétaires de l’entité américaine sont propriétaires d’un nombre minimal déterminé d’actions de la société étrangère acquérante et que le groupe de sociétés affiliées élargi (expanded affiliated group) qui comprend la société étrangère n’exerce pas d’activités commerciales substantielles (substantial business activities) dans le pays étranger où a été constituée la société étrangère.

Si les anciens propriétaires de l’entité américaine sont propriétaires de 60 % à 80 % des actions de la société étrangère après l’acquisition, l’entité expatriée doit payer de l’impôt sur le gain découlant de l’inversion (inversion gain) pendant les 10 années suivant celle-ci. On entend généralement par gain découlant de l’inversion tout revenu tiré du transfert ou de l’octroi sous licence de biens dans le cadre de l’inversion ou, si le transfert ou l’octroi survient après la réalisation de l’opération, en faveur d’une personne liée étrangère. Le gain découlant de l’inversion ne peut être compensé par des attributs fiscaux tels que les pertes d’exploitation nettes. Si les anciens propriétaires de l’entité américaine sont propriétaires d’au moins 80 % des actions de la société étrangère après l’acquisition, cette dernière est considérée comme une société américaine aux fins de l’impôt fédéral des États-Unis après l’acquisition.

Il n’est pas tenu compte de certaines catégories d’actions de la société acquérante étrangère aux fins du calcul des seuils de 60 % et de 80 %. L’article 7874 exclut déjà de ce calcul les actions émises dans le cadre d’un PAPE, mais l’IRS avait ajouté d’autres catégories d’actions devant être exclues du calcul dans les anciennes lignes directrices et fait de même dans les nouveaux règlements.

Voici quelques-unes des nouvelles règles qui s’appliquent aux inversions :

Règle relative aux acquisitions réalisées en plusieurs étapes. Les nouveaux règlements augmentent le nombre de situations dans lesquelles on doit considérer globalement les étapes multiples d’une opération pour déterminer les seuils de propriété aux termes de l’article 7874. Les nouvelles règles excluent généralement les actions d’une société étrangère de la quote-part de propriété considérée aux termes de l’article 7874 lorsque celles-ci ont été émises dans le cadre de l’acquisition d’une autre entité américaine au cours des 36 derniers mois.

Règle relative aux distributions effectuées autrement que dans le cours normal. Les distributions effectuées autrement que dans le cours normal des activités au cours des 36 mois précédant l’opération d’inversion seront prises en compte dans le calcul du pourcentage de propriété que détiennent les actionnaires de la société cible américaine dans la société acquérante étrangère. Les nouveaux règlements comprennent un ensemble de règles complexes permettant de déterminer dans quels cas une distribution effectuée avant une opération d’inversion doit être considérée comme une distribution effectuée autrement que dans le cours normal des activités.

Règle relative au pays tiers. Dans le même ordre d’idées, aux termes des nouveaux règlements, il n’est pas tenu compte des actions d’une société acquérante étrangère émises en échange d’une entité étrangère acquise dans le cadre de l’acquisition d’une entité américaine lorsque la société étrangère acquise est résidente d’un territoire étranger différent de celui de la société acquérante étrangère (à savoir, un « pays tiers » (third country)). Dorénavant, cette règle s’applique dans les cas suivants : (i) la société acquérante étrangère acquiert la quasi-totalité des actifs d’une autre société étrangère dans le cadre de l’acquisition d’une entité américaine; (ii) au moins 60 % des actions de la société acquérante étrangère sont détenues par les anciens actionnaires de la société étrangère acquise; (iii) le domicile aux fins de l’impôt de la société acquérante étrangère n’est pas le même que celui de la société étrangère acquise; et (iv) la quote-part de propriété déterminée sans égard à la règle relative au pays tiers se situe entre 60 % et 80 %.

Règle relative à l’assujettissement à l’impôt. L’avis de 2015 incluait une disposition selon laquelle la société acquérante étrangère qui n’est pas assujettie à l’impôt à titre de résidente du pays étranger en cause est réputée ne pas satisfaire le critère relatif à l’exercice d’activités commerciales substantielles. Ce critère est intégré tel quel dans les nouveaux règlements.

Règle relative au gain découlant d’une inversion. Selon l’article 7874, si, à la suite d’une opération d’inversion, la quote-part de propriété se situe entre 60 % et 80 %, l’entité expatriée doit payer de l’impôt sur le gain découlant de l’inversion pendant les dix années suivant l’inversion. Les nouveaux règlements élargissent la portée du gain découlant de l’inversion.

Règle relative à la caractérisation des sociétés étrangères contrôlées. L’avis de 2014 faisait état du fait que le Département du Trésor craignait que certaines opérations impliquant une société étrangère contrôlée par une entité américaine à la suite d’une inversion de 60 % (communément appelée une « filiale étrangère expatriée ») pourraient permettre au groupe d’échapper à l’impôt prévu par la sous-section F auquel il aurait normalement été assujetti à l’égard de la société étrangère contrôlée. Les nouvelles règles découragent ce type d’opération en modifiant la caractérisation des transferts d’actions et de biens qui entraînent une dilution du pourcentage de propriété que détient l’entité américaine dans la filiale étrangère expatriée.

Accélération de la constatation du gain. L’application des nouveaux règlements entraîne des gains dans le cadre de certaines transactions à l’égard desquelles s’appliquaient auparavant des dispositions de non-constatation, mais où il était possible de soustraire ces gains à l’impôt pour le futur.

L’avis de 2014 et l’avis de 2015 comprenaient des dispositions qui avaient pour but d’empêcher la dilution de gains réalisés à l’étranger qui pouvaient faire l’objet d’un report d'impôt. La version provisoire des règlements prévoit cette restriction.

Les nouveaux règlements intègrent la plupart des autres règles énoncées dans l’avis de 2014 et dans l’avis de 2015, sous réserve de certaines exceptions et restrictions.

Conclusion

Avant la publication de ces règlements, certains envisageaient de contester l’approche adoptée dans l’avis de 2014 et l’avis de 2015. L’intégration des règles que prévoyaient ces avis dans les nouveaux règlements compliquera la possibilité d’une contestation.

Toutefois, un tribunal pourrait raisonnablement arriver à la conclusion que l’IRS, en adoptant ces règlements, a outrepassé son autorité. Ainsi, la disposition relative aux acquisitions réalisées en plusieurs étapes pourrait être contestée sur le fondement de son application rétroactive, qui a pour effet de punir les contribuables qui ont procédé à des opérations d’inversion dans les 36 mois ayant précédé la publication des règlements.

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